"A quoi ressemble ton espace de travail ?"
Je ne sais pas pour vous, mais je suis incapable d'écrire dans un endroit où je passe le reste de mon temps. À mon bureau ? Non. J'y suis déjà assise toute la journée pour le boulot. M'y poser encore une fois le soir ne me procure pas cette sensation de "coupure" dont j'ai besoin. Ce n'est pas assez exclusif. Dans la bibliothèque ? Pourquoi pas, mais malgré le confort de mon fauteuil mangeur d'âme — le genre dont vous ne vous relevez plus une fois vous y être laissé tomber — la position n'est pas idéale pour travailler, regrouper des papiers et s'étaler. Dans le salon ? Compliqué, au milieu du bruit, du lave vaisselle qui tourne, des activités quotidiennes et des conversations. Bref, comment mettre en ordre ses pensées avant de les coucher sur papier, lorsque l'environnement ne s'y prête pas ?
Dans un sens, je trouve que l'écriture est une activité un peu — beaucoup — égoïste. On est seul face à sa feuille ou son ordinateur, on se coupe totalement du monde, plus rien d'autre ne compte. Je suis incapable d'écrire si quelque chose me distrait, si l'on me parle, s'il y a de la musique ou une émission de télé lancée non loin. Ça fait sauter le fil de mes pensées. Quand je passe en mode auteure, je me transforme en ermite dans sa grotte. J'ai besoin de calme, de silence, de solitude, parce que l'écriture me demande de chercher au fond de moi, de triturer mes méninges et mes tripes. Et c'est parfois difficile à faire comprendre à ses proches, surtout s'ils n'écrivent pas eux-mêmes. Rajoutez à ça la culpabilité de tout lâcher pour s'accorder quelques heures pour écrire, sachant qu'il y a toujours autre chose à faire dans la maison, et vous obtiendrez le cocktail détonnant de ma vie. La cohabitation entre quotidien et écriture n'est pas toujours aisée pour moi, d'autant que ce n'est pas mon activité principale... Et, petit à petit, écrire avait fini par générer plus de frustration que de plaisir.
J'ai même failli lâcher l'affaire.
Alors, il était temps de faire quelque chose, parce que je ne me vois pas ne pas écrire. J'ai besoin de raconter ces histoires, de faire vivre ces personnages sous ma plume, j'ai besoin de me retrouver au travers d'eux, de m'accorder une pause dans le tumulte. Dans mon ancien appartement, je m'étais aménagé un petit secrétaire dans un coin de ma chambre. C'est là que j'avais terminé Pandora en 2014. Depuis, ledit secrétaire a été réquisitionné pour l'atelier et j'avais pour projet de m'installer dans une autre pièce, dès que celle-ci serait terminée. Mais les travaux du futur bureau étant loin d'être achevés, et vu qu'ils ne le seront pas avant plusieurs mois, j'ai décidé de prendre le taureau par les cornes. Parce qu'il devenait urgent de me retrouver et que j'avais vraiment besoin d'un espace à moi pour poursuivre le Liber eX Pandora et le futur roman. Alors, au boulot ! Il se trouve qu'il y avait ce studio photo, caché sous la mansarde tout au fond de mon atelier, que je n'utilisais plus depuis des mois... L'endroit idéal pour m'aménager un petit cocon douillet et renouer en douceur avec l'écriture. Plus haut, je parlais d'ermite dans sa grotte. Je crois que ce nouveau bureau, c'est carrément ça.
Un soir, j'ai tout dégagé, j'ai fait de la place, nettoyé, réuni quelques affaires et aménagé ce minuscule endroit pourtant si important... Quelques heures plus tard, la grotte prenait une tournure qui commençait à me plaire et qui ressemblait à ce que j'espérais : un espace sain, clair, agréable, dans lequel je pouvais enfin regrouper tout ce qui est en rapport avec mes projets et mon univers : les livres survivants de la V1 de Blinded, les projets précédents — First Rage et Witches --, toutes les versions de Pandora Project, les épreuves de l'oracle d'Ishsaar, les carnets d'idées... Mais aussi les quelques livres qui me servent à faire évoluer ma plume, les figurines à l'effigie des personnages de Pandora Project et de la lumière, mes stylos favoris, des bougies, de l'encens, mon éternel plaid... De quoi retrouver la flamme perdue et reprendre du plaisir à écrire...
Et donc, ci-dessus, voilà tout ce qu'il me reste de plusieurs années de travail sur la V1 de Blinded : les livres tirés avant le double crash informatique, et quelques notes pour la V2. Je n'ai plus rien d'autre, plus aucun fichier informatique, plus de sauvegarde, et c'est à partir de ça que je vais construire ma nouvelle version du roman (et j'ai hâte). Ça fait plaisir de leur réaccorder une place de choix sur l'étagère !
Je peux vous dire que je n'ai qu'une hâte désormais : me poser à mon bureau et reprendre le travail. C'est déjà bon signe, non ? Et vous ? Comment concevez-vous l'acte d'écrire ? Avez-vous besoin de calme ou êtes-vous un auteur tout terrain ? À quoi ressemble votre espace de travail ? Quels sont les éléments indispensables pour votre confort d'écriture ? Dites-moi tout, je suis curieuse !